L'égarement messiano-gnostique

Philosophies et religions ouvrent des voies pour trouver un sens à la vie, échapper au mal et à la souffrance. Face aux épreuves qui l’accablent, le peuple juif espère la venue d’un messie qui lui ouvrira l’accès au Royaume, Jésus révèle qu’il en est la porte que chaque homme peut emprunter en renonçant au mal et en suivant son exemple. Il prévient cependant : « Mon royaume n’est pas de ce monde », il n’appartient pas à l’homme d’arracher l’ivraie. Mais des hommes ont cru pouvoir venir à bout du mal - et plus souvent de ce qui s’opposait à leurs désirs - par la loi, les armes ou la politique. C’est la caractéristique de l’idéologie, un système de pensée qui se sert de la notion de salut pour se légitimer et justifier tous les moyens à ses fins. Les héritiers des sicaires et des judéonazaréens cherchent un messie guerrier, un Grand Timonier. La dérive laïciste vient de loin. Les musulmans comme les héritiers des Lumières, révolutionnaires, communistes ou progressistes portent la même illusion messianique funeste, celle de croire qu’ils sont les acteurs du salut des autres. Convaincus d’avoir la solution pour changer le monde et le sauver, ils s’exonèrent du devoir de purifier leur cœur mais imposent la catharsis aux autres. C’est sur ce dévoiement de la promesse biblique et de l’Évangile que se fondent les totalitarismes. Qu’ils soient athées ou invoquent Allah, ils confondent toujours le temporel et le spirituel.

Nazisme, communisme et capitalisme résultent du même cheminement initié en Europe depuis l’éveil de l’humanisme. La révolte contre l’Église lancée par la Réforme s’est transformée en rejet du christianisme libérant le projet de transformer l’humanité : sur la mort de Dieu, l’homme s’est sacré dieu. Une ancienne hérésie jusque-là réprimée a fini par s’imposer. Ses croyants sont convaincus de pouvoir bâtir le Royaume par la raison et la force ! Ils sont déterminés à sauver l’humanité par tous les moyens et contre son gré : certains ont élaboré une idéologie religieuse, d’autres des idéologies politiques. Les premiers sont les musulmans ; les autres sont révolutionnaires, marxistes ou libéraux radicaux. Ceux-là s'inscrivent dans la continuité d’un humanisme qui apostasie sa christianité, la contradiction est insurmontable : l’arbre n’a plus de racine et sa sève se tarit. Les uns font le pari du collectivisme mais tous celui de l’individualisme.

C’est cet individualisme forcené qui recèle l’héritage gnostique. L’oligarchie bourgeoise qui s’est emparé du pouvoir n’a pas de patrie mais des intérêts de possédants ou des orgueils de sachants. La démocratie est prise en otage au nom des droits de l’homme pour servir son égoïsme capitaliste et son hypocrisie socialiste au mépris du peuple dont elle dénie le droit à la continuité.

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