Kabbale et République

D'après « Archives du mondialisme - De la guerre contre l'Ancien et le Nouveau Testament » par Pierre Hillard, Nouvelles Terres, 2019 et « La République Universelle du genre humain » d’Anacharsis Cloots par Pierre Hillard, Omnia Veritas Ltd, 2019.

De nombreux historiens ignorent ou passent sous silence l’influence du judaïsme sur la Révolution française par scrupule d’impliquer collectivement les juifs pour l’engagement de quelques-uns. Le rejet des religions sous couvert du rejet du catholicisme leur ferme les yeux sur une part essentielle de l’inspiration idéologique de cet événement majeur. Il ne s’agit pas ici de désigner des coupables mais des responsables en prenant leurs déclarations au sérieux. Ainsi, le baron Jean-Baptiste de Cloots d’origine prussienne, dit Anacharsis Cloots, né en 1755 près de Clèves en Allemagne et guillotiné le 24 mars 1794 à Paris, partisan de la Révolution française et tenant fervent de l'athéisme, proclamé citoyen français par l’Assemblée nationale législative le 26 août 1792, député de l’Oise à la Convention, écrivait dans son ouvrage « La République universelle, ou Adresse aux tyrannicides », 1792, pp. 186-187 : « La Révolution et donc l’instauration de la République n’était pas une fatalité mais une étape pour atteindre un niveau supérieur [une gouvernance mondiale]. Un corps ne se fait pas la guerre à lui-même et le genre humain vivra en paix lorsqu’il ne formera qu’un corps, la NATION UNIQUE. Les hommes se rangeront sous l’oriflamme du genre humain en s’écriant avec transport : une nation, une assemblée, un prince ! Mépris aux raisonneurs pervers ou stupides qui oseraient encore nier la possibilité de l’établissement universelle des droits de l’homme. C’est sur les débris de tous les trônes que nous bâtirons l’édifice de la république universelle. Au reste le peuple fera justice lui-même de l’absurde catholicisme. Déjà la plupart des hommes libres se refusent à courber la tête en vils exclaves dans un confessionnal. Tant que la plupart des Français assisteront aux sorcelleries de la messe, tant qu’ils croiront que trois font un, et que la partie est plus grande que le tout et qu’un corps existe en plusieurs lieux à la fois et qu’un homme efface les péchés d’un homme, il sera difficile de les guérir de la duperie du fantôme royal. La royauté est une espèce de prêtrise non moins absurde que tout autre sacerdoce. La France libre se lèvera un jour pour jeter un cri étonnant et unanime : point de Roi, point de prêtre ! La France n’ayant plus ni province, ni généralité, ni seigneur, ni vassaux, ni bourgeois, ni paysan, ni ville, ni village, la France nivelée en paisible commune est devenue une citée paternelle, la cité de Philadelphie dont l’enceinte embrassera nécessairement tout l’univers. Toutes les villes et les cours disparaitront à l’aspect imposant et consolant de Philadelphie. L’Europe et l’Afrique et l’Asie et l’Amérique donneront la main dans la cité vaste et heureuse de Philadelphie. J’ai démontré géographiquement, politiquement, physiquement, moralement que la commune de Paris sera le point de réunion, le fanal central de la communauté universelle. Nous (les Révolutionnaires) trouverons encore de puissants axillaires, de fervents apôtres dans les tribus judaïques qui regardent la France comme une seconde Palestine. Nos concitoyens circoncis nous bénissent dans toutes les synagogues de la captivité. Le juif, avili dans le reste du monde est devenu citoyen français (en 1791), citoyen du monde, par nos décrets philosophiques. Cette fraternisation alarme beaucoup les princes allemands, d’autant plus que la guerre ne saurait ni commencer ni durer en Allemagne, sans l’activité, l’intelligence, l’économie et le numéraire des juifs. Les magasins, les munitions de toute espèce sont fournies par les capitalistes hébreux, et tous les agents subalternes de l’approvisionnement militaire sont de la même nation. Il ne faudra que s’entendre avec nos frères les rabbins, pour produire des effets étonnants, miraculeux. J’ai reçu à cet égard des réponses infiniment satisfaisantes de mes commettants du Nord. La cause des tyrans est tellement désespérée, que les aliments les plus sains se changent pour eux en poison subtils. On accusa les juifs, dans les siècles de ténèbres, d’empoisonner les sources ou les puits ; et voici que dans notre siècle lumineux, les juifs, en fournissant viandes pures, aideront l’humanité à exterminer la tyrannie. […] Cette heureuse tendance des hommes de tout climat nous annonce l’avènement du nivellement final, la souveraineté universelle, LA NATION UNIQUE, LE PEUPLE HUMAIN. »
Parmi les juifs qui participeront à l’exportation en Europe de la Révolution, il y a le lieutenant-général Georges Alexandre Matuszewitz (1755-1819), commandant de l’artillerie hollandaise dans l’armée de Napoléon, fils d’un lettré de Kopyczynce, pilier de la secte frankiste et confident de Jacob Frank (1) vénéré entre les XVIIIe et XIXe siècles par de nombreux juifs d’Europe et d’Orient comme la réincarnation de Sabbataï Tsevi (1626-1676) qu’ils reconnaissent comme le messie ! Anacharsis Cloots révèle le concours matériel des juifs à la Révolution et l’influence de la doctrine ésotérique judaïque : la kabbale. Spécialiste de l’histoire religieuse de la République, Vincent Peillon, lui-même de confession juive, affirme que : « avec la Révolution, la Providence fait sa part de l’œuvre, et c’est du côté humain qu’elle n’est pas encore accomplie… Ce thème du concours de l’homme à la création de Dieu fait jonction entre la kabbale juive, illuminisme et les philosophies de l’histoire républicaine… » (2), il ajoute « dès lors que, fondamentalement, l’admirable hérésie protestante conduit, comme la kabbale ou illuminisme, à considérer que l’action de Dieu exige d’être continuée par l’action de l’homme, que la créature est elle-même créatrice, que la révélation est devant nous, nous nous trouvons face à une anthropologie républicaine qui repose sur une disposition onto-théologico-politique spécifique. » (3) Il faut revenir aux débuts de la Révolution de 1789 pour saisir cette influence juive kabbalistique sur la République, dont Vincent Peillon se garde d’expliciter l’histoire et la généalogie. Tandis que, comme l’explique Cloots, des juifs soutiennent l’effort de guerre révolutionnaire, des crypto-juifs travaillent à influencer idéologiquement la Révolution. Le plus influent d’entre eux est sans aucun doute le petit-cousin de Jacob Frank. Il s’agit de Moses Dobruschka, alias Franz Thomas von Schönfeld, alias Junius Frey (1753-1794). (4) Lorsque éclata la Révolution française, il se rendit à Strasbourg (en 1792) et devint un membre activiste influent au sein du club directeur de la Révolution, le Club des Jacobins tout en demeurant en relation avec son groupe frankiste, le bruit ayant d’ailleurs couru qu’il devait prendre la direction de la secte après la mort de Frank. La principale contribution de Junius Frey à la Révolution française fut littéraire et philosophique. Bien installé dans les milieux révolutionnaires français, occupant une place importante au Club des Jacobins, Junius Frey rédige un livre dans lequel il théorise les fondements théologiques (en fait kabbalistiques) de la démocratie et de la République. L’ouvrage a pour titre « Philosophie sociale dédiée au peuple français » 1793. Commentant ce livre, le grand historien du judaïsme et spécialiste de la kabbale, Gershom Scholem (1897-1982), explique que « cet ouvrage est animé, dans les passages relatifs à la religion, par un radicalisme éclairé qui, aux yeux des frankistes, ne contredit nullement la mystique ésotérique, mais au contraire la complète » (5)
Les révolutionnaires et les républicains ont cherché à établir une religion pour soutenir leur régime comme l’écrit Junius Frey dans l’introduction de son livre : « chaque gouvernement est une espèce de religion, qui a sa théologie, le système de la démocratie ou de la liberté a la sienne… » (6) Junius Frey présente les bases de cette religion occulte de la République – qui deviendra la laïcité – d’essence kabbalistique, que l’on retrouvera chez les théoriciens républicains du XIXe. Cette pénétration de la kabbale dans la Révolution et la République est affirmée par Gershom Scholem lorsqu’il écrit : « Cette tentative d’union des idées de la Révolution françaises et des idées messianiques a eu un succès extraordinaire. Nous avons perdu de vue en général l’attrait qu’elle a exercé sur les esprits et aussi ce qu’avait d’insolite à l’origine ce projet visant à identifier ces deux courants d’idées et à interpréter le messianisme des livres prophétiques et de la tradition juive d’après l’idéal de la philosophie nouvelle du XVIIIe siècle… Nous serons stupéfaits de constater que les racines de cette idée doivent être cherchées précisément dans la Kabbale » et explicitant l’hostilité au christianisme : « Il faut toujours garder à l’esprit qu’entre le christianisme et le judaïsme, il y a une divergence fondamentale touchant le messianisme qui vient de ce qu’ils ont une notion différente de la rédemption. Ce que le christianisme regarde comme le fondement glorieux de sa confession de foi et comme la donnée essentielle de l’Évangile est rejeté avec détermination et combattu par le judaïsme, deux mondes inconciliables. » (7)
La France résulte de la synthèse entre le catholicisme et la royauté. De 496 (Baptême de Clovis) à 1789 (Révolution française), la France a existé avec les aléas de l’Histoire en s’appuyant sur la Monarchie et l’Église. Le peuple français a complètement intégré ce système qui a conservé la nation et qui fait partie du code source de son identité et de son système politique. Ce qu’on appelle communément « le conservatisme » français n’est rien d’autre que l’attachement à cette structuration politico-religieuse qui a permis la survie de l’Europe et de la France à partir du haut Moyen-Âge face aux assauts de l’islam (8). Les républicains étant parfaitement conscients de cette réalité historique ont tenté de remplacer la royauté et l’Église par des institutions de substitution: la République (la contre-monarchie) et la religion des Lumières – qui deviendra la laïcité (le contre-catholicisme).
Alors que ce peuple résiste encore, l’immigration de masse qui lui est imposé le condamne à la marginalité. Dès la Révolution, Cloots en avait perçu l’intérêt : « L’étranger, expression barbare dont nous commençons à rougir, nous voyons à Paris, à Londres à Amsterdam plaider sa cause d’un Persan, d’un Indien, d’un Chinois, d’un Péruvien, d’un Turc, d’un Cafre, d’un Arménien. On discute en Europe des intérêts d’un habitant des antipodes et l’on doutera si une assemblée représentative des deux hémisphères peut exister pour le bonheur permanent de l’humanité. Je ne connais de barrière naturelle qu’entre la terre et le firmament. Je demande la suppression du nom Français à l’instar de ceux de Bourguignon, de Normand, de Gascon, tous les hommes voudront appartenir à la RÉPUBLIQUE UNIVERSELLE. »

Références :
1/ Gershom Scholem, « Aux origines religieuses du judaïsme laïque, de la mystique aux Lumières », Calman-Levy, 1999, p.214.
2/ Vincent Peillon, « Une religion pour la République », Seuil, 2010, pp.63-64
3/ Vincent Peillon, op. cit., pp.259-261.
4/ Sur l’histoire de Junius Frey, son parcours, et l’influence idéologique qu’il exerça sur la République, voir Youssef Hindi, op.cit.
5/ Gershom Scholem, « Du Frankisme au jacobinisme », Gallimard-Seuil, 1982. p.73.
6/ Junius Frey, « Philosophie sociale dédiée au peuple français », 1793, p.73.
7/ Gershom Scholem, « Le messianisme juif », Calman-Lévy, 1992, pp.14, 33.
8/ Henri Pirenne, « Mahomet et Charlemagne », Presse Universitaires de France, 1970, pp. 22-23-24



On le voit, l’emprise d’un certain judaïsme sur la République et l’Europe est prégnante dès ses débuts et se maintient jusqu’à aujourd’hui comme en témoigne les déclarations Vincent Peillon qui fut ministre de l’Éducation nationale et l’activisme de figures telles que Bernard-Henri Levy et de Georges Soros. Le procès en antisémitisme occulte cette réalité et condamne le discours. En écartant la haine contre les juifs, les anathèmes et les procès d’intention s’opposant à l’analyse des faits sont intellectuellement insupportables mais plus encore parce qu’ils concourent à un agenda hostile à la France.

Il faut admettre l’existence d’idéologies mondialistes et complotistes mais la conclusion sur la responsabilité du judaïsme n’est pas pertinente aussi parce qu’il est traversé de courants différents et antagonistes. C’est ainsi que frankisme-sabbatéen partisan de la destruction de l’ordre social traditionnel de la nation, la famille, la race, la religion, la propriété privée et de l’inversion des valeurs morales de la Torah est lui-même hostile au judaïsme (1) ! Gunther Plaut (1912-2012) célèbre rabbin réformiste fait dire à Jacob Frank: « Je suis venu pour porter la révolution dans le Monde. Les musulmans, les catholiques, les russes ou les grecs orthodoxes, les juifs – Je suis venu pour libérer les peuples de leur esclavage envers la loi, et initier une nouvelle religion. Le fait de tromper leurs prêtres et leurs acolytes est un bienfait pour l’humanité, vous comprenez. » La secte qualifiée de sataniste est soupçonnée d’avoir eu une part dans le génocide des chrétiens d’Anatolie par les Turcs et le génocide des juifs d’Europe par les Nazis (2)… Ils continueraient à exercer leur d’influence au sein toutes les religions mais aussi dans les courants progressistes et déconstructeurs modernes.

Cette théorie du complot d’une secte frankisme-sabbatéen omniprésente et omnipotente parait simpliste en réduisant l’évolution du monde à son influence. Elle ne rend pas compte de la complexité et de l’importance d’autres courants de pensée. La réflexion sur ce sujet n’est cependant pas arrêtée. Si un messianisme radical a cherché à tirer parti des évolutions des idées et des mentalités pour nourrir ses délires apocalyptiques et universalistes, on ne peut lui prêter le contrôle de ces évolutions, sauf à admettre qu’il soit effectivement supérieur à tous les autres courants et que les hommes s’y rallient. Mais c’est plus probablement certains traits du frankisme communs à d’autres projets qui cheminent : l’illusion de l’universalisme, de l’homme nouveau, de la paix définitive… Si la question doit continuer à être explorer, la réponse complotiste est une impasse car elle n’ouvre pas la voie à une libération de son emprise. L’hypothèse soulève une approche plus fructueuse cherchant à comprendre la défaillance des courants qui s’opposèrent à son agenda et notamment, le premier d’entre eux : le catholicisme. Sauf encore à le dire manipulé par le frankisme ou l’un de ses avatars, il faut rechercher les causes internes de ses dérives. Dans « Un sermon trop loin », un fidèle s’interroge sur des orientations suicidaires de l’Église, c’est une première étape…


Références :
1/ Gershom Scholem, « Sabbataï Tsevi : Le messie mystique 1626-1676 »
2/ Heineke Kardel, « Adolf Hitler : fondateur d’Israël », 1974















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